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lundi 5 août 2013

Les vacances, c'est fini

En général, les personnes saines d'esprit se débrouillent pour éviter de trouver un travail en été. Je veux dire, quitte à être au chômage pendant 7 mois, autant pousser un peu et passer l'été peinard jusqu'a la rentrée des classes. 

Ceci est sans compter sur le fait que s'installer au Canada coûte un bras. Officiellement, l'immigration te demande d'arriver avec 2100$ sur ton compte en banque, pour vivre sans ressource les trois premiers mois.
Mais mes amis, je vous le dit bien haut : SORNETTES. Si vous êtes candidats au PVT Canada, sachez qu'avec 2100$ vous tiendrez environ 1 mois.

Un exemple?
  • S'installer dans son nouveau logement en payant le premier mois d’avance + le ½ mois de caution : 1200$ en Colombie-Britannique 
  • Acheter un vélo, un anti-vol et un casque pour arrêter de payer 3$ son billet de bus à usage unique : 190$ 
  • Acheter un lit, des draps, un oreiller et une couette : 200$ 
  • Accepter de payer pour les appels entrants et pour les appels interurbains surtaxes (comme France Telecom en 1937) : 50$ /mois le forfait de téléphonie mobile
  • Manger au resto le temps d'avoir une maison ou cuisiner : 30$ /jour 
  • Passons sur l'hôtel, économisé grâce au couchsurfing pendant 3 semaines (mais comptez 35$ /nuit en dortoir
  • Oubliez le vin et la bière, taxés comme au temps de la prohibition : un mauvais pinard qu'un français utiliserait pour faire mijoter un civet coûte ici 15$. Ne pensez pas économiser sur la bière (un pack de Heineken: 21$). 
  • Je ne parle pas du prix des transports au Canada (traverser le pays en bus : 220$. En avion : 600$. Pass mensuel pour les transports en commun : +/- 100$). 
Pas besoin d'avoir fait Saint-Cyr pour comprendre que les 2100$ initialement prévus pour mes trois premiers mois sont en fait partie en quelques jours. C'est donc contrainte et forcée que j'ai dû me mettre en quête d'un travail en plein milieu d'un été radieux comme la Colombie-Britannique n'en avait encore jamais connu

Travailler... Je n'avais pas travaillé depuis le 18 janvier 2013. Sept mois de chômage bien remplis de choses palpitantes que la vie nous offre, je veux dire, en dehors du bureau. Sept mois d’"inactivité", sans un seul temps mort.
Pourtant, en quittant mon poste au mois de janvier, j'étais réellement terrifiée à l'idée de me lever le matin sans but précis. Ma vie d'alors était rythmée par mon travail, je me levais à 7h, j'avais 1h de métro et de train, je travaillais bêtement pendant 9h, j'avais 1 autre heure de métro et de train, je buvais de l'alcool pendant 2h avant de dormir 7 ou 8h, et le week-end je travaillais de chez moi, parfois souvent. Comment allais-je remplir mes 24h sans travailler ?? Pensais-je alors.

Sept mois plus tard pourtant, de l'autre cote de la planète, après avoir eu le temps de barouder aux Emiras-Arabes-Unis, en Israël, en Palestine, en France, en Espagne et au Québec, après avoir pleuré, déprimé, hésité, planifié, après avoir cuisiné, mangé, tenté de bronzer, beaucoup rigolé, après avoir tenté de rester, de recoller des morceaux éparpillés, après m'être plantée, puis enfin, après avoir décollé, je suis face au parfait opposé de ma question initiale : comment vais-je avoir le temps de VIVRE aussi intensément que je viens de le faire, en travaillant 8h par jour, cinq jours sur sept?? 

Mais bon voilà, pour les raison bêtement financières exposées plus haut, je n’avais pas le choix : il me fallait un boulot. Et ce n’est pas mon emploi bénévole (pour lequel j'ai du passer un entretien comme pour un vrai travail, sauf que je ne toucherai rien de plus qu'une lettre de recommandation) de "responsable marketing digital" a temps partiel qui va payer les factures.

Heureusement, trouver un travail à Vancouver a été a peu près aussi facile que trouver un appart : il suffit de se présenter sur le lieu de son choix en disant que tu cherches a travailler.
Alors que je venais de commencer une carrière prometteuse de vendeuse de bagels, j’ai flashé un matin sur un café classé dans le Top 10 des meilleurs cafés de Vancouver. Ni une ni deux, j'ai quitté bagels et cream cheese pour aller argumenter avec le patron dudit café, en lui expliquant que bien que je n’ai aucune expérience en Latte, ni en service, ni même en restauration, avoir une française dans son équipe était un point non négligeable pour briller auprès de sa clientèle.
Convaincu, il m’a dit de revenir le lendemain à l’aube, pour commencer ma formation d'artiste du Latte.

Alors voilà, depuis une semaine, je travaille a la Cittadella.
De l’avis de mes nouveaux collègues, tous barmen  de profession, c’est l’endroit le plus difficile où ils ont jamais travaillé. Moi-même, je ne fais pas trop la maligne avec mes diplômes et mes expériences de bureau : franchement, je n’ai jamais eu de travail aussi difficile. Non seulement la restauration est un métier épuisant, mais en plus j’apprends tout de zéro, et je suis nulle. Mon ego en prend un sacré coup.
Je suis debout, et active a 200% pendant 8h consécutives, souriante avec les clients, et suante en cuisine ou je dois comprendre les recettes, les techniques de torréfaction, le nom des ustensiles de cuisine (en anglais), gérer les commandes en plein rush, faire la vaisselle et cuire les gâteaux. 

Et seulement 30 malheureuses minutes de pause (non payées, of course) par jour pour faire pipi et m’étirer. C’est l’Amérique du Nord, le pays où tout est possible pourvu que tu sois en bonne santé et que tu oublies tes avantages sociaux.
Ai-je précisé que je n’ai pas de contrat, ni aucune garantie de salaire les deux premières semaines? 

Bref. Les deux premiers jours, j’ai cru que je n’y arriverai jamais. J’avais tellement mal partout en quittant le café que je n’arrivais pas à marcher jusqu’à mon vélo, et je m’effondrais dans mon lit à 21h45 en me disant que j’étais une grosse naze bonne a rien.

Mais depuis quelques jours, je le vis bien mieux. Je crois que je me suis habituée a ce nouveau rythme! Les journées commencent tôt mais finissent tôt, et j’ai le temps de faire du vélo, d’aller à la plage et de diner avec des amis avant que le soleil ne se couche. En fait, contre toute attente, j’ai trouvé un équilibre que je n’avais encore jamais eu : travailler ET vivre en même temps. Avec la sensation inédite d’utiliser ma tête ET mon corps, à 100%. C’est GRISANT !

Vue sur la terrasse du Caffe Cittadella

After work sur la plage de Kitsilano
Petit parc au bout de ma rue

Sortie du boulot : ya pire comme vue, quoi

Mon velo d'amour

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